Le génie du droit d’auteur

Résumé

Les divergences marquées entre les deux rapports des comités parlementaires publiés en 2019, celui du Comité permanent de l’industrie, des sciences et de la technologie et celui du Patrimoine canadien, sont une indication des antagonismes qui existent au Canada entre un droit d’auteur noyé dans une multitude d’intérêts et un droit d’auteur centré sur le créateur. De la même manière, il semble que l’on puisse parler d’une école de pensée ontarienne composée de nombreux universitaires qui, sans que l’on puisse parler de front commun, remettent en cause soit la gestion collective soit l’exclusivité accordée au titulaire en faisant valoir l’intérêt des utilisateurs. L’activisme de ces individus qui disposent souvent d’une audience enviable a une réelle influence sur la perception du droit d’auteur, souvent négative, auprès du public. Certains y voient même la célébration d’un divorce entre le droit d’auteur et le public. La Cour suprême n’est pas indifférente à leurs arguments. En réalité, depuis l’affaire Théberge, dont les faits n’avaient pourtant pas de quoi soulever l’émoi national, le droit d’auteur est devenu un lieu marchand où priment le jeu de l’équilibre et la pesée des intérêts. Et à ce jeu, les titulaires ont généralement été les perdants. Se pose alors une nouvelle fois la question de la réalité du bijuridisme canadien, mais surtout, de la place et de l’avenir de la tradition civiliste dans le débat sur les objectifs de la loi et de son interprétation. Le droit civil et son subjectivisme portent naturellement les fondements d’un droit d’auteur personnaliste. Au Canada, cette observation ne peut être faite sans prendre en compte la préservation de la langue française tant dans son rôle artistique que doctrinal. Mais il semble que la portée de la tradition civiliste qui embrasse à la fois cette identité de langage et une certaine vision de la culture se soit éteinte. Il n’y a pas de dialogue entre les traditions juridiques canadiennes dans les lieux de création du droit d’auteur, parlementaire ou judiciaire. Peut-on alors encore parler de droit d’auteur ?

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